Certains principes éducatifs ont la vie dure. De génération en génération, les parents semblent s’y accrocher comme à des bouées, sûrs de transmettre ainsi des repères à leur progéniture ballotée dans un océan de doutes. Tous partent d’excellentes intentions et sont à mille lieux d’imaginer qu’ils ne font que répéter des phrases qui non seulement n’apportent aucun réconfort, mais ne font en général qu’aggraver le problème.

Je pense par exemple à cette remarque que j’ai encore entendue hier en consultation : « Léa doit apprendre à travailler pour elle, pas pour la maitresse. » Autrement dit, il est attendu par ses parents que Léa écoute, essaie, apprenne d’une personne qu’elle que soit celle-ci. Que l’enseignante soit souriante ou antipathique, rassurante ou sévère, encourageante ou jugeante, Léa devrait mettre la même ardeur dans son travail. Et si elle ne parvient pas à garder la tête froide, elle consultera un psychologue pour que ce dernier l’aide à montrer davantage de maturité.

Rappelons le haut et fort : pour qu’un enfant puisse s’épanouir à l’école, il doit pouvoir sentir qu’il existe un lien fort et réciproque entre lui et son enseignant.

Depuis longtemps, le discours du corps enseignant a été de croire que son rôle était d’instruire, uniquement instruire. Ce fameux « on n’est pas là pour aimer nos élèves ». Et pourtant, les neurosciences nous montrent le contraire et une génération nouvelle d’enseignants met la bienveillance et la réassurance au cœur de leurs pratiques. C’est en se connectant à l’autre dans un environnement soutenant que l’enfant pourra donner le meilleur de lui-même au niveau cognitif et social. En maternelle, Léa et ses camarades ont besoin d’avoir envie de faire plaisir à leur maitresse. Plus tard, ils devront aussi avoir envie d’impressionner un professeur pour passer des heures à réviser un contrôle.

Ce lien socio-affectif est normal et humain, et il ne concerne pas que les enfants. Quel adulte a envie de faire des heures sup pour un patron tyrannique ? Au travail, n’a-t-on pas aussi besoin d’un lien affectif avec nos collègues pour nous investir personnellement dans un projet, y consacrer du temps et de l’énergie ?

Pour réussir ses apprentissages en étant heureux à l’école, tous les enfants ont besoin de bienveillance et d’encouragements. Quand ce n’est pas le cas, c’est l’école qui se trompe de voie, pas l’enfant. Le rôle des parents est alors de rassurer leur enfant, de lui montrer qu’ils sont de son côté, qu’ils le comprennent et qu’ils vont essayer de l’aider en cherchant à comprendre ce qu’il se passe au sein de la classe ou avec l’enseignant. En prenant rendez-vous avec le professeur, le directeur ou même l’inspecteur, ils donnent un signal fort au corps enseignant et à leur enfant en montrant que c’est bien la relation qui est au cœur de l’envie de faire et d’apprendre.

Cécile Viénot